Sucré vs amer : pourquoi aime-t-on certaines saveurs plus que d'autres ?

On considère souvent que tous les humains perçoivent, grâce à des récepteurs situés sur la langue, 5 types de goûts : l’amer, le sucré, l’umami, le salé et l’acide, auxquels on a ajouté récemment celui du gras.

L'analyse, au niveau individuel, des seuils de sensibilité gustative à un ensemble de produits purs en solution montre une organisation dichotomique de cette sensibilité, avec une acuité gustative des produits attractifs et bénéfiques (sucres) d’un côté, et des produits potentiellement nocifs (alcaloïdes, tannins ou acides) de l’autre. Le réflexe gusto-facial (c’est à dire la réponse immédiate, dès la naissance, à des stimulations gustatives positives pour un sucre et négatives pour un composé amer) est un exemple de cet héritage phylogénétique partagé par tous les primates, humains compris.

La perception négative du goût des produits amers est liée à l’évitement des substances des plantes qui peuvent être toxiques, comme les alcaloïdes. Les perceptions acides révèlent l’immaturité des fruits alors que les goûts sucrés, perçus comme plaisants dès la naissance, permettent de détecter la concentration énergétique des aliments. L’umami révèle la présence d’acides aminés (donc des protéines) qui correspondent à des apports indispensables à l'organisme. En revanche, la perception du sel est plus difficile à expliquer en termes adaptatifs car les plantes consommées par les primates ont des concentrations en sel bien inférieures à celles qu’ils sont capables de détecter, et ce composé exhausteur de goût n’a que récemment été introduit dans l’alimentation humaine. Il s’agirait donc plutôt d’une propriété fortuite liée à la relativement faible spécificité des fibres nerveuses.

Plusieurs amis trinquent avec une bière

Groupe de dégustation de bière

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Enfin, les apprentissages sociaux et culturels peuvent totalement inverser les perceptions positives ou négatives « originelles » des stimuli olfacto-gustatifs et modifier les préférences pour tel ou tel aliment : c’est ainsi que l’on peut « apprendre » à aimer le café ou la bière, malgré leur amertume prononcée !

Bruno Simmen, éco-anthropologue, chargé de recherche au Muséum national d’Histoire naturelle

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